C’est un cap symbolique, mais révélateur de l’évolution rapide du climat. La température de la Méditerranée pourrait temporairement atteindre les 30°C dans les prochains jours, selon les prévisionnistes de Météo-France. Un niveau que l’on n’observait autrefois que très rarement, même au pic de l’été. La Corse sera-t-elle impactée par ce phénomène ? “Ce n’est pas impossible”, estime Jérémy Gaudin, prévisionniste de Météo-France à Ajaccio. “Les températures sont remontées depuis une semaine, et on revient sur des valeurs de 25-26°C sur l’ouest de l’île, et parfois jusqu’à 28°C en Balagne et le long de la côte orientale. Il est possible qu’on atteigne temporairement 30°C dans les jours à venir.” Pour autant, il relativise : “Ce serait vraiment temporaire, et surtout, on resterait quand même relativement proche des normales pour un mois d’août.”
La Méditerranée reste toutefois la mer qui se réchauffe le plus vite au monde. Lors de la première vague de chaleur de l’été, entre la fin du mois de juin et le début du mois de juillet, la température de l’eau autour de l’île avait dépassé les 28°C en surface, un record de précocité. “La température de la mer est montée très vite, comme cela a rarement été observé pour un début d’été". " D’habitude, on constatait ces températures au mois d’août", rappelle le prévisionniste de Météo France. Un rafraîchissement temporaire avait suivi sous l’effet du mistral et de la tramontane, “qui ont soufflé pendant assez longtemps et qui ont chassé l'eau de surface plus au large”, faisant perdre à l’eau entre trois et quatre degrés autour de la Corse, avant que la canicule actuelle ne fasse à nouveau grimper la température.
Mais au-delà de ces épisodes caniculaires ponctuels, les scientifiques observent une hausse continue de la température de la Méditerranée. “En Corse, la surface de l’eau a pris un degré en 10 ans”, expliquait, il y a quelques mois, Michel Marengo, le directeur scientifique de la station de recherches sous-marines et océanographiques Stareso, à CNI. Une tendance qui s’installe dans la durée, rendant les pics de chaleur estivaux de plus en plus fréquents et inquiétants.
Une température aux effets durables sur la biodiversité
Si les 30°C attendus cette semaine ne devraient durer que quelques jours, ils s’inscrivent dans une tendance bien plus lourde de conséquences. Plus que la température en surface, c’est la durée et la profondeur de ces vagues de chaleur qui inquiètent les scientifiques. “On observe de plus en plus de canicules marines, qui sont l’équivalent d’un incendie sous-marin. Pendant plusieurs jours, on a des températures très chaudes aussi bien en surface où on enregistre plus de 30°C, qu’en profondeur où on peut avoir jusqu’à 27°C à 40 mètres”, détaillait Michel Marengo à l’occasion de la conférence des Nations unies sur l’océan, qui s’est déroulée à Nice au mois de juin.
Des épisodes qui peuvent avoir des effets dévastateurs sur les espèces sous-marines. “Cela crée un bouchon d’eau chaude, et donc des mortalités massives, comme chez les coraux ou les gorgones. Les poissons sont aussi impactés, comme les mérous, qui ont été récemment touchés par le nodavirus, qui provoque des troubles neurologiques, des gonflements de la vessie natatoire, et donc la mort.”
Le phénomène affecte aussi toute la chaîne alimentaire, avec une baisse du zooplancton et donc une diminution des poissons et des crustacés, comme les langoustes. “Comme dans tout cycle saisonnier, pour la maturation des œufs et pour les cycles de reproduction, il faut qu’à un moment donné la température descende puis remonte. Nous avons constaté que depuis 2010, il y a moins de zooplanctons. Or, derrière, c’est toute la chaîne alimentaire qui est perturbée.” Le réchauffement bouleverse aussi la répartition des espèces, dont certaines, originaires du bassin oriental de la Méditerranée ou de mers tropicales, qui migrent désormais vers la Corse. “C’est le cas du poisson-perroquet, qui a été signalé au large de l’île il y a quelques années, mais aussi du barracuda ou de la dorade coryphène, qui sont de plus en plus présents près de la Corse. On le voit aussi au niveau de la flore, avec l’algue Halophila stipulacea, originaire de l’océan Indien et qui se propage en Méditerranée, et notamment en Corse, qui a été observée pour la première fois dans la baie de Calvi il y a deux ans.”
Mais ces températures anormalement élevées pourraient aussi accentuer les risques d’épisodes orageux violents à l’automne. Lorsque les premières masses d’air froid descendent du nord notamment en septembre ou en octobre, la différence avec la chaleur accumulée en mer crée une forte instabilité atmosphérique. “Bientôt, les températures dans l'air vont commencer à baisser, et si la Méditerranée est plus chaude que l'air qui la surmonte, ça risque de provoquer une évaporation très importante”, souligne le prévisionniste de Météo-France. “Plus l'évaporation va être importante, et plus ça va générer de l'instabilité dans l'atmosphère, avec des phénomènes orageux qui peuvent être plus violents et des précipitations.”
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